Au plus offrant

Une silhouette noire, sur un cheval noir marchant au pas, se détacha sur le chemin de montagne menant au château. Valéria leva les yeux sur celui-ci, et pensa qu'elle avait vu pire, comme architecture... Ca avait pas l'air joyeux, mais elle n'était pas là pour ça.

Lentement, mais sûrement, elle s'approcha de la porte fortifiée. Son cheval renifla nerveusement, et elle passa la main gauche dans sa crinière, doucement. Rien à craindre. Au pire, elle était armée jusqu'aux dents: bouclier dans le dos, épée longue à gauche, lance d'arçon sur le côté du cheval, prête à être mise en position de frappe... C'est pas trois branleurs et deux imbéciles qui allaient lui faire peur: elle avait connu pire. Une petite fenêtre en bois s'ouvrit dans la porte, et les yeux de Valéria, presque cachés par son casque, se fixèrent sur le type:

"Je suis Valéria Kerridan. J'ai entendu dire que l'armée du Royaume de Soras avait besoin d'hommes... Considérez que j'en suis un."

Elle était même bien plus que ça... Et son prix allait être en conséquence. Les portes s'ouvrirent lentement, alors que deux gardes se positionnaient de chaque côté: une étrangère armée de la tête au pied devait forcément être surveillée... Au cas où.

Evidemment, lorsqu'elle entra dans la salle du banquet, c'était toujours à dos de cheval.

Valéria en sauta lestement, et fit deux pas dans la pièce, y jetant un regard et acquiesçant d'un signe de tête rapide lorsqu'on lui annonça qu'elle allait être reçue. Elle s'était attendue à un bureau de recrutement, ou truc du genre... Ils n'étaient pas très à cheval sur la sécurité, dans le coin.

Pour une fois depuis quinze jours, Alienor prenait son repas dans la salle des banquets.
Certaines affaires l’avaient appelées à rester dans les sous-sols et elle n’était pas mécontente de respirer un peu… Mais elle le regretta bien vite.
L’agitation de la salle et les imbéciles qui y étaient assis commencèrent rapidement à lui taper sur les nerfs et elle se dépêcha de terminer son assiette.

Dés qu’elle eut fini, elle fit signe à un esclave et se leva.
Personnellement, elle n’avait jamais ressenti le désir d’avoir un esclave personnel… Elle trouvait ça encombrant et pas forcément très utile. Après tout, les esclaves du château étaient là pour ça…
A son signe, un esclave se précipita sur son assiette et l’emmena vers les cuisines.
Visiblement, la maniaquerie de la chef des assassins étaient connue… Et ce n’était pas plus mal.
S’avançant lentement entre les tables, elle fit quelques signes de têtes à certains de ces hommes, leur signifiant qu’ils devraient la rejoindre plus tard dans les sous-sols.
Ils lui répondirent comme un seul homme et continuèrent à manger comme si de rien n’était… La discrétion est maîtresse de survie… Du moins pour Alienor.

Mais alors qu’elle arrivait à la porte, une jeune femme entra, juchée sur un cheval, et en descendit lestement.
Elle entendit une fois affirmée à l’inconnue qu’elle allait être reçue et Alienor se prit à l’observer de plus près. La dépassant d’une large tête, elle était, somme toute, assez impressionnante.
Et, au vu de son attirail, Ali aurait presque parié son poste de chef qu’elle venait là pour entrer dans l’armée de Markhal… Soit.

Sortant de l’ombre projetée par la porte, elle s’approcha du cheval et de la femme, son visage de marbre, comme d’habitude.
"Bonjour mademoiselle… Puis-je vous aider ?" Dit-elle d’un ton assez clinique tout en fixant le cheval.
Les animaux avaient l’art de ne pas l’aimer… Elle l’avait rapidement compris grâce à Aram, le griffon qui tenait lieu de gardien à Markhal. Il lui avait déjà piqué quelques plumes au passage…
Mais celui-ci n’avait pas l’air agressif sur le coup et elle battit tout doucement des ailes tout en reportant son attention sur la jeune femme.

Valéria se tourna vers la jeune femme, et tendit la main sur la gauche, pour intimer à son cheval de ne pas bouger. On savait jamais: une ruade dans une môme maigrelette avant même d'être recrutée, ça l'afficherait mal. Et puis, c'était quoi, ces conneries? C'est ça qu'on appellait un recruteur, chez eux? On se serait cru dans une boutique de fringues de la capitale d'Elendil...

* Je suis en panne de pantalons, ça se voit pas? *

Elle resta cependant totalement de marbre, rabaissant son bras gauche jusqu'à ce qu'il soit proche de la garde de son épée. De toutes façons, elle était faite pour se sortir avec le bras droit.

"Si vous pouvez m'indiquer un recruteur ou me verser ma prime d'engagement vous-même... Oui."

Elle enleva son casque, dénouant ses cheveux au passage, pour les laisser pendre sur ses épaules. Ils étaient légèrement mouillés de sueur, et un peu d'air ne leur ferait pas de mal.

Un léger sourire passa sur les lèvres d’Alienor puis elle reprit son expression de marbre alors que les trois assassins à qui elle avait fait signe passaient derrière elles pour descendre dans les sous-sols.
"Je n’en ai normalement pas pour très longtemps." Glissa-t-elle à l’un d’eux puis, elle reporta son attention sur la guerrière.
"Et bien, ça ne se passe tout à fait comme ça. Normalement, c’est à Markhal ou Alectö de décider… Mais ils sont encore vadrouille."
Nonchalamment, elle sortit une dague de sa manche et commença à jouer avec tout en évitant la pointe… Elle réfléchissait tout en tendant son don empathique. Tiens tiens, la demoiselle était irritée ?
*Je m’demande la tête qu’elle aurait faite si elle était tombée sur Markhal… Ca aurait pu être amusant.*

"Je peux prendre sur moi de vous engager… J’en discuterai plus tard avec Alectö. Si j’arrive à le trouver."
Elle avait parlé tout bas tout en rangeant sa dague puis elle battit de l’aile droite.
"Bon, vous faites partie de l’armée. Vous vous arrangerez avec votre chef pour les…modalités…"
Lentement, elle s’apprêta à partir mais une idée lui passa brusquement par la tête et elle se retourna vers la nouvelle guerrière de Soras.
"Vous venez tout juste d’arriver ou vous avez eu le temps de faire un petit tour ?" Demanda-t-elle en faisant un signe de la main englobant le château.